30 octobre 2024

L’inflation, l’Euro et les prix.

ENQUÊTE SUR DIX ANS : 2002-2012

Presque maintenant onze ans après l’arrivée de l’euro, nous gardons le sentiment que les prix ont flambé. Il n’est pas rare d’entendre notre entourage mentionner le fait que le produit proposé avait le même prix il y a dix ans, mais en Franc. En effet, d’aucuns constatent sur certains achats que seule l’unité a changé. La somme est la même avec le symbole Euro affiché à côté, ce qui présume sans grand calcul nécessaire une augmentation par 6,55 !
Dans ce procès d’augmentation des prix, l’Euro n’est pas seul responsable et il est peut-être utile de refaire le point sur cette course à la flambée.
 
Les chiffres.
En regardant les chiffres annoncés par l’INSEE, nous constatons qu’en effet les prix de certains produits ont grimpé et que d’autres ont baissé. En finalité, sont relayés dans les médias, les indices officiels nous démontrant que le pouvoir d’achat des Français a progressé. Pourquoi ? Parce qu’en 2002 et 2012, soit tout juste 10 ans, le niveau du SMIC a été élevé à + 35,4 % alors que les prix à la consommation ont tout juste frôlé les 15,2 %.
Il est inutile de contester ces chiffres, ils sont bien réels et ils coupent l’herbe sous les pieds de tout « trouble-fête » souhaitant évoquer une quelconque flambée.
Toutefois, malgré la véracité de ceux-ci, ils sont néanmoins trompeurs, car l’inflation telle que la calcule l’INSEE n’est que moyenne de milliers de prix relevés mensuellement et ne reflète que trop peu les fortes hausses de certains produits.

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Pour coller un peu plus à la réalité, QueChoisir a proposé un calcul différent ramené au coût des produits lié au temps de travail nécessaire pour les payer sur la même période (2002-2012). Les calculs suivants sont basés sur un SMIC au 1er janvier 2002 à 6,83 € bruts et au 1er décembre 2011 à 9,19 € bruts.
Si l’on prend le cas de la baguette de pain, si chère (sans jeu de mots) aux Français. Elle est passée de 0,67 à 0,85 €, soit une hausse de 27 % largement supérieure à l’inflation annoncée de 15,2 %. Pourtant, un smicard travaillera 20 secondes de moins pour se la payer aujourd’hui augmentant de ce fait son pouvoir d’achat. Mêmes chiffres, avec une approche différente, vous suivez le raisonnement ? Alors je continue… Toujours, selon QueChoisir, un poulet Label rouge d’un kilo a, en dix ans, dépassé trois fois l’inflation avec une progression de 47 % (contre 15,2 annoncé) et ce même smicard devra travailler 4 min 33 s de plus pour l’acquérir.

Tout augmente.
Il n’est donc pas rare et insensé d’entendre dire que tout augmente, d’autant plus que Jean Paul Geai et Natacha Ducatez de QueChoisir nous informent « Les grandes surfaces s’étaient engagées à un gel des étiquettes de six mois, du 1er octobre 2001 au 1er avril 2002, et elles ont peu ou prou tenu leur engagement, sauf que nombre d’entres elles avaient anticipé ce blocage et relevé leurs prix avant, tandis que d’autres se rattrapaient dès le second trimestre de 2002 […] Ensuite, les prix ont été marqués par une certaine accalmie jusqu’en 2006 avant de repartir à la hausse dès 2010, gonflés par l’envolée des cours des matières premières et une crise financière sans précédent » Seul responsable ? Non. Il est facile de constater que la flambée des prix se greffe sur les dépenses contraintes. Logement, transports, carburants, assurances, mutuelles… ainsi que les nouveaux postes de débits, tels que les abonnements internet et téléphonies. Autant de postes « nécessaires » qui dégradent eux aussi le pouvoir d’achat sur lesquels viennent s’ajouter, sur les produits alimentaires, les baisses des prix sur les achats futiles et les flambées sur les achats utiles.

Coupable mais pas seul responsable.
L’Euro n’est pas seul responsable, il a servi de levier à un changement d’unité psychologique.
Il y a moins de dix ans, qui aurait acheté du thé à 80 francs les 100 grammes, du pain au poids à 66 francs les deux morceaux, la baguette à l’ancienne à 10 francs, la tarte (décongelée) du boulanger du coin à 17 francs ou des sweats « bas de gamme » à 131 francs… et pourtant, traduisez en euros et vous constatez que c’est ce que l’on fait, que c’est ce que l’on subit. La liste serait longue, je vais la finir en visuel avec un extrait de relevés de prix pratiqués par QueChoisir.

L’arrondi.
L’effet « plus cher » a une autre origine : l’arrondi.
Lorsqu’en francs, nous arrondissions un article, comme une salade, à sa valeur plafond, nous pouvions au maximum lui ajouter 99 centimes de francs. Aujourd’hui, ce même réflexe est resté et la même envie d’arrondir au plafond supérieur un article le pousse à coup de 99 cents d’euros, soit presque 6,50 francs. Il s’agit là d’une énorme différence, car si nous prenons le cas d’un café ; au début les gens ne convertissaient pas forcément [puisqu’on leur disait de ne pas le faire pour s’habituer à pratiquer l’euro sans réfléchir :)] et l’augmentation de 50 cents pouvait faire sourire. Puis tout à coup, on s’est aperçu que le pain, le riz, les pâtes, le café, les boissons en distributeurs, augmentaient par palier de cinq ou six francs d’un coup.
Avec tout cela, pouvons-nous dire que « Tout est plus cher ? »
À vous de juger, mais il faut croire que non puisqu’on achète quand même, et cela en plus grande quantité » [source INSEE]
 
© sources de ce dossier : QueChoisir 499. Photographies : Photl, PhotoXpress / Illustrations : Stefane Guilbaud

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