22 novembre 2024

Les centenaires Abkhazes

Longévité ≠ Santé. Depuis plus de dix ans, je suis gêné par les statistiques qui nous rassurent sur le fait que nous vivons de plus en plus vieux. Ils sont fiers de nous indiquer que les hommes qui naissent aujourd’hui ont une espérance de vie moyenne de 78,2 années et les femmes 84,8 années. Il est vrai que le calcul est simple. En trente ans, les hommes ont une espérance de vie augmentée de 8 ans et les femmes de 6,5 ans et bien plus encore si l’on sait que l’espérance de vie était de 27 ans pour les hommes et 28 ans pour les femmes au XVIIIe siècle. Cela n’a échappé à personne, tant les médias l’ont répété. Les championnes de l’espérance de vie en Europe restent à ce jour les Françaises. Magnifique, dirions-nous, mais, pour être complètes, ces statistiques, ignorent un petit bout de phrase qui a son importance « … en bonne santé ».

Vivre vieux, d’accord, mais en bonne santé !

« Pour la France, l’indicateur européen Healthy Life Years (HLY) est de 62,4 années pour les hommes et de 64,2 années pour les femmes. Les Suédois, champions d’Europe, frôlent les 70 années de bonne santé. Il ne suffit manifestement pas seulement de guérir, ce que nous faisons plutôt bien, mais de prévenir, ce que nous faisons encore mal par rapport à nos plus sages voisins du nord.* »

L’espérance de vie… en bonne santé. N’est-ce pas cela qui nous intéresse le plus ?
Depuis dix ans, je me pose la question de savoir à qui profite le « crime ». À qui cela peut-il bien profiter, de nier le fait, que nous régressons sur la tenue de notre bonne santé. À l’industrie agroalimentaire des alicaments ? L’industrie pharmaceutique ? À un lobby des maisons de retraite médicalisées ?

Je n’ai pas toutes les réponses, mais une question :  » Comment changer cette donne, comment recouvrer la longévité digne, et profiter d’une longue et bonne santé ? »
Pour tenter d’y voir plus clair sur les solutions envisageables, nous aurons ce mois-ci, non pas une révélation (quoi que ! ), mais le constat d’un pari gagnant sur l’alimentation santé, à travers la description d’un mode alimentaire d’un peuple du Caucase, les abkhazes.

Tradition et longévité font bon ménage !

9ggv_MapAbkhaze_1Certains peuples vivent plus vieux que nous avec une propension à être en bonne santé une majeure partie du temps. Tout le monde a entendu parler des régimes crétois (méditerranéens) et okinawaïens (Okinawa – Japon). Ces peuples pratiquaient un régime basé sur l’équilibre alimentaire conformément à une observation de la nature et des éléments. Avec respect, observation et intelligence, ils ont su traverser les époques en bonne santé. Toutefois, il n’y a pas que ces deux peuples, les plus connus, et ils ont tendance à nous faire oublier les autres.

L’Abkhazie est un ancien territoire de l’ex-URSS. Aujourd’hui autonome, ce pays se situe à l’ouest de la Géorgie, contre la mer noire. Le climat y est doux et subtropical, le décor est montagneux avec des plaines et des plages. Les Russes ont fait de ce pays du Caucase, à l’époque, leur « Monte-Carlo », leur « Riviera Russe ». Dans ce pays, outre les nombreux centenaires, on vit en bonne santé. Centenaires ou pas, on passe presque 95 % d’une vie sans être malades, avec une santé physique et mentale débordante. Rançon du succès, seulement 3 % des centenaires souffrent de la maladie de Parkinson. Pour la petite histoire, 80 % des centenaires abkhazes ne se trouvent pas si vieux que cela.

Vivre vieux ne doit pas être un leitmotiv. En tous cas, ce n’est pas le mien. On a souvent tendance à me demander si ma façon de manger a un rapport avec la peur de la mort. Aucun. Je souhaite vivre en bonne santé le plus longtemps possible et vise la qualité sur la quantité… une fois de plus.

Le mode de vie abkhaze.

Il se résume en 5 points lors des repas :
– Frugalité
– Convivialité et sérénité.
– Tendance végétarienne et crudivore.
– Pauvre en gluten, produits laitiers et viande.
– Riche en fruits et légumes frais (et non traités) ; en acide gras essentiel mono et polyinsaturé ; en plantes sauvages.
et 2 points en dehors des repas :
– L’hygiène de vie, de façon générale.
– Le respect des Anciens.

La clef d’un succès.

Identique au régime okinawaïen. Une des clefs du succès de ce régime reste la frugalité. De petites portions proposant une grande quantité d’aliments. On dit que pour rester en bonne santé, un être humain devrait maintenir une variété de 45 à 50 aliments. Il est facile de constater que certains modes alimentaires modernes plafonnent à seulement 20 aliments (sans parler de leurs qualités nutritionnelles).
Chez les abkhazes, la nourriture est peu calorique et riche en éléments nutritifs. Une formule idéale qui leur confère des silhouettes minces et sèches et qui épargne les femmes de la cellulite (certainement lié à une alimentation frugale très pauvre en gluten).

L’instant est roi.

Les repas se prennent dans le calme. Tout le monde est à table. La mastication est primordiale. En somme, tout le contraire de ce qui est pratiqué en Europe et aux États-Unis. Le plus troublant, reste que ces communautés ont un profond respect pour les Anciens, tout comme les okinawaïens. Nous savons aujourd’hui que les peuples qui respectent les personnes âgées sont en parfaite harmonie et profitent d’une santé mentale et d’un confort psychologique très utiles à l’épanouissement personnel. Proche de cette tradition, chez les Abkhazes, il n’est pas rare, par prestige, d’accueillir une personne âgée, étrangère et seule, au sein de sa famille et de la chérir comme l’un des siens. Côté équilibre, ils sont adeptes de la marche (y compris avec une canne), s’épargnent de tout stress inutile, pratiquent une activité sexuelle tardive et active et ne rechignent pas devant des bains d’eau froide. Une seule priorité… la vie au calme. Des tests ont démontré qu’ils ne souffrent pas d’anxiété et qu’ils possèdent une adaptabilité importante. Ils restent maîtres de leur vie et assument tout !
 

> On est loin de nos modes de vie, recentrés sur l’individu, en quête de jeunesse éternelle et de tranquillisants.

Proche de la nature.

Très proches de la nature, ils consomment énormément de végétaux et de légumes (200 variétés environ), peu de viande et de poisson et pas de sucre (surtout le raffiné) : tout comme les hommes du paléolithique. Ils peuvent faire un repas 100 % fruits à base de kakis cueillis et mangent régulièrement une abondance de fruits tels les cerises, dattes, figues, fraises, grenades, kakis, mandarines, mini-bananes, oranges, pommes, pêches… Donc, pour résumer : Pas de sucre blanc raffiné, presque pas de dessert**, pas de pâtisseries à la crème ou de viennoiseries. Peu de pain (même s’il est fait à la main), peu de viande et de poisson *** Fruits, légumes, aromates et herbes en abondances. Oignon, ail, persil, coriandre, persil… Il faut savoir qu’un abkhaze peut manger une demi-botte de basilic ou de coriandre en un seul repas, à lui tout seul. Le condiment (adjika****) remplace le sel, peu utilisé. Beaucoup de thé vert local, de l’eau de source de montagnes, un peu de vin rouge sec et faible en alcool. Et pour finir, une pharmacie, ou plus une trousse prévention (que l’on appelle alicament chez nous) composée de baies d’argousier, de grenade et de baies d’églantier. Ils cultivent tout eux-mêmes, sans ajout de pesticides, ni engrais chimiques. Ils produisent essentiellement des oléagineux (sans paradoxalement produire d’olives), des céréales, des fruits et légumes. Rares sont les malades et quand ils le sont, ils ne se soignent pas à coup de molécules chimiques, mais tout bonnement, et le plus simplement du monde avec des plantes.
 
> On est loin de nos contrées ou tout devient interdit. Chaque agriculteur ou paysan en herbe est soumis aux diktats d’une bande de voyous qui souhaite très vite posséder le vivant, ou chacun doit se soumettre à des politiques agricoles basées sur l’intérêt à grande échelle. L’image de cette Abkhasie me fait penser aux petites illustrations de fermes qui ornaient mon livre de lecture à l’école primaire. Toutes ces fermes qui n’existent plus aujourd’hui, malheureusement éradiquées en même temps que la paysannerie, après 1945 (lire « La guerre au vivant » de Jean-Pierre Berlan)

Régime équilibré

La préférence alimentaire va, tout comme tous les centenaires du reste du monde, vers une consommation pauvre en produits laitiers et en viande. Ils sont flexivores, c’est-à-dire qu’ils ne se privent pas de viandes, mais ils n’en abusent pas non plus. De plus, leurs viandes sont plus proches des gibiers que de nos machines à protéines en barquette. Les produits laitiers, tout comme dans le régime crétois, se résument à quelques brebis et chèvres soigneusement produits à partir de produits locaux, artisanaux. Il est intéressant de savoir qu’une cuisinière abkhaze ne prépare pas à foison. Chaque repas comprend le nombre exact de portions chaudes à consommer. Pas de reste donc et une culture du produit frais éloignant la politique du tout réfrigérateur. Leur mode de vie leur permets de ne pas stocker inutilement la nourriture chez eux, car ils préfèrent cueillir sur l’arbre et profiter des bienfaits des vitamines et enzymes.

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Lac en Abkhazie.

> Il est manifeste que l’alimentation joue un rôle primordial dans le schéma d’une bonne santé. Aussi, je vais profiter de cette « voix au chapitre » pour rappeler que ces similitudes avec les deux régimes les plus connus (crétois et okinawaïen) ne sont pas des coïncidences, mais bien des analogies de ce que la nature propose. Tous ces peuples, car il en existe plusieurs actuellement dans le monde, se nourrissent sainement et en harmonie, la nature le leur rend bien. Il s’agit du principe de base de la « lutte contre le nutritionnisme » que je préconise dans ma démarche de désobéissance alimentaire. Je l’explique à qui veut l’entendre dans mes conférences. Je ne demande à personne de posséder un jardin, un quotidien sans stress, des hectares de prairies et des animaux sauvages et domestiques. Mais plutôt de comprendre que la solution est chez vous, dans vos comportements, dans votre alimentation et vos gestes quotidiens, à l’opposé des chants du marketing bien pensant.
 
* http://www.lalongevitefrancaise.com/category/statistiques & http://www.lanutrition.fr/bien-dans-son-age/vieillissement/prevenir-le-vieillissement/les-super-centenaires-du-xxe-siecle.html
** Leur dessert préféré, un dessert à base de maïs avec très peu de matière grasse.
*** Tout comme ces peuples, miser sur des viandes de qualité (Bio, gibier sauvage, etc… qui apportent un réel apport nutritionnel.)
**** Adjika : pâte à base d’épices séchées avec piment, coriandre et ail frais. 
© Sources : BioContact n°221 / février 2012 & merci à Anastassia Venediktova, naturopathe psycho-énergéticienne d’origine abkhaze. Rien que dans sa famille, dit-elle, « j’ai trois centenaires : une tante de 101 ans, une tante de 99 ans et une grand-mère de 97 ans.
 
 

3 réflexions sur « Les centenaires Abkhazes »

  1. Bonjour, c’est étrange, je viens d’entendre Robert Masson parler des Abkhases dans une interview assez connue (un pistolet dans l’assiette : on la trouve sur Youtube ; le passage sur les Abkhases est dans la première partie, à 16mn). C’est d’ailleurs en voulant en savoir plus sur ce peuple que je suis tomée sur votre article. Or au contraire de vous, il prétend que les Abkhases mangent à 80-90 % de la viande (ou des produits animaux)… En fait, selon lui, on trouverait autant de centenaires chez les mangeurs à dominance végétale, que chez les mangeurs à dominance animale. Ce serait donc plutôt une question de qualité des produits et de frugalité. .

    1. Merci Sandrine pour l’intérêt que vous portez à mon travail. Je connais le travail de Robert Masson et j’ai un éditeur en commun avec lui. Si je suis au moins d’accord avec lui sur la frugalité des régimes, je reste néanmoins surpris de ce qu’il avance, d’une part sur la consommation de viande des Abkhases, d’autre part sur les centenaires d’Okinawa qui ne mangent pas de fruits ? Avec tout le respect que je dois à Robert Masson, lorsque j’ai voulu le citer dans d’autres ouvrages, mes éditeurs m’en ont dissuadé. Il avance par exemple des propos séduisants contre le soja qui ne sont pas faciles à prouver. Bref, je vais rester sur l’avis de la naturopathe Abkhase Anastassia Venediktova qui m’a inspiré cet article, sachant que ce blog n’est ni militant proviande, ni vegan.

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