Mais faut-il se rendre à l’évidence lorsqu’elle en montre tous les stigmates ?
Si l’on considère que l’alimentation est le reflet d’un état, il y a manifestement un réel mal-être. En matière d’alimentation, je n’ai jamais vu autant de coachs prometteurs, de solutions miracles, de médecines parallèles, d’alicaments illusoires et d’innovations improbables.
On a tout pour réussir. Un pays riche, un climat, une situation géographique, des ressources suffisantes et pourtant nous ne sommes plus capables de l’apprécier. Nous n’avons plus assez faim pour en vouloir suffisamment, car nous ne jurons que par nos conforts technologiques individualisés. Est-ce le fruit d’une mémoire amnésique par une trop longue période de paix en Europe ? Et quid d’une certaine jeunesse qui préfèrent brûler des voitures pour s’exprimer ? Côté repas : On mange dans la rue, de plus en plus jeune, on jette tout par terre, on est déraciné.
Nos cantines gaspillent et nos « sans-abri » meurent de faim. On observe le superflu sans limites des uns alors que l’essentiel des autres n’est même pas satisfait. Nos paysans souffrent et s’isolent face à des bourgeois urbains étiquetés « fashion victim » et devenus gros consommateurs du tout et du rien. Notre agriculture est tellement caricaturale, que ses protagonistes ne s’aventurent même plus à consommer le fruit de leur propre travail tant ils redoutent la dangerosité des pesticides, qu’ils considèrent [à juste titre, mais ce n’est que mon avis] impropre à leur consommation. Nous perdons pied et nous nous réfugions devant le petit écran, grand Dieu de la télé-réalité névrotique. La manipulation des masses fut, sous nos contrées, religieuse, salariale pour devenir, aujourd’hui, médiatique.
De qui s’inspirer alors pour redevenir heureux ? Pas de l’actualité en tout cas !
Allez courage, je vais vous parler d’une tribu qui redonne goût au bonheur.
À travers cette description, vous découvrirez ce qu’ils font et ce que nous ne faisons plus.
Vous découvrirez aussi, l’enfermement médiatique et sociétal dans lequel nous sommes.
Ce même monde qui nous conditionne pour trop et mal manger.
Alors attention… moment de bonheur
En 1977, un jeune missionnaire, Dan Everett était parti avec l’idée de convertir au christianisme, un peuple isolé au fond de la jungle amazonienne, les Pirahãs. À l’âge de 27 ans, il a été séduit par leur philosophie jusqu’à en oublier sa mission et rester sept ans parmi eux. Vingt ans après, il continue de les étudier. Daniel, en tant qu’anthropologue et missionnaire, vous dirait «
J’y suis allé pour leur parler de mon Dieu et c’est eux qui m’ont converti »
Les Pirahãs sont les membres d’une tribu de chasseurs-cueilleurs d’Amazonie, qui vit principalement sur les rives du Rio Maici, au Brésil. Leur nombre s’est considérablement réduit depuis plusieurs décennies (en 2004, ils n’étaient plus que 340). Leur culture est désormais menacée de disparition.
Mais pourquoi citer cette population en particulier ?
Parce que malgré leur pauvreté, ce peuple fait preuve d’une joie de vivre débordante. Son principal secret : l’invention d’un langage que nous, occidentaux, traduisons comme « langage du bonheur » et qui défie toutes les théories dominantes en linguistique. Cela relance la réflexion sur le lien entre langage et culture. Leur langue ne semble n’avoir aucune proposition relative et aucune récurrence grammaticale. La prononciation des mots repose sur une phonie minimale avec seulement sept consonnes et trois voyelles. Toutefois, en tant que langue tonale, elle fait preuve d’une très grande musicalité. « Tonale » signifie que ce langage utilise le même mot pour désigner différents objets en modifiant seulement l’intonation. Elle peut d’ailleurs être sifflée ou fredonnée. En raison de cette euphonie, les Pirahãs sont à l’écoute de tout : de la forêt, des saisons, des bruits du vent et de ses moindres détails et ce n’est pas anodin. L’écoute rapporte. Nos ancêtres savaient écouter et rythmaient leur vie avec modestie et intelligence. « La terre se goûte, la terre s’écoute » me disait mon grand-père quand j’étais petit. Nous avons perdu ce sens, ou plutôt nous l’avons désorienté… à coup de MP3 nasillards ou de zapping TV.
Mais la particularité la plus stupéfiante reste que leur langue se ne conjugue qu’au présent. Il n’existe pas de passé [pas de regrets, pas de tristesses liées aux dialogues] et pas de futur [pas de frustrations, pas d’angoisses ou d’inquiétudes]. Ce peuple vit son instant avec bonheur, sans compétition, sans ambition dévorante et destructive. D’ailleurs, ils ne travaillent pas plus que nécessaire, c’est à dire pas plus que ne l’exigent leurs besoins immédiats. Ils ne sont pas désireux d’acquérir nos objets, nos fusils, nos voitures… et se satisfont de qu’ils ont. C’est une de leurs très grandes forces : ils ne sont pas achetables et depuis mention de leur existence en 1784, ils n’ont jamais été colonisés.
Ils passent le plus clair de leurs temps à sourire ou à rire, comme aucune autre population au monde ne sait le faire. Leur journée est rythmée sans aucune hiérarchie et aucun rite. Ils sont en effet considérés par nous tous comme très heureux sur ce point. Pas de violence, pas de mort inutile. Ils vous diraient « Pourquoi tuer cette gigantesque tarentule qui grimpe sur un genou. Elle est utile, car elle mange les cafards et elle ne fait pas de mal ? ». Idem pour un crocodile ou un serpent passant dans les parages.
D’après ce que les Pirahãs ont dit aux chercheurs, leur culture se base sur les expériences vécues par les individus au cours de leur vie. L’union entre deux individus est tout aussi simple. Les deux amoureux s’éclipsent quatre jours dans la forêt pour en revenir en « couple légitime ». Si toutefois cette union ne fonctionnait pas, pour recréer un couple, il leur suffit de retourner dans la forêt en bonne compagnie.
Quel lien avec l’alimentation ?
Les Pirahãs font de courtes siestes allant de quinze minutes à deux heures, le jour comme la nuit, mais dorment rarement une nuit entière. Ils sont souvent affamés, non pas par manque de nourriture, mais par envie de s’endurcir (tigisái). Ils pratiquent cette sorte de régime minimal un peu à la manière du « Hara Hashi Bu » japonais et considèrent leurs aliments comme nécessaires et utiles plutôt que superflus et futiles. L’alimentation est partagée au sein de la communauté et tout individu handicapé ou trop âgé est immédiatement pris en charge par le reste des membres. Ne pas partager est inconcevable, mais si toutefois cela se produisait il y aurait des tensions qui seraient, elles aussi, réglées sans violence… par le dialogue. Oui ! Par le dialogue, car tout se gère comme cela. Au final, cette tribu note un taux record manifeste de personnes sèches, musclées et en bonne santé. Il a été relevé aussi que leur santé mentale reste cohérente très longtemps et que les personnes âgées, aidées par une alimentation diététique constante et une assistance de la communauté, vivent relativement vieilles.
Conclusion.
Une vision, certes du mythe du « Bon Sauvage ».
« Bon », c’est sûr ! « Sauvage »… de qui parle-t-on ?