J’ai connu un temps où la principale pollution venait
de ce que les gens secouaient leur tapis par la fenêtre.«
Gilbert Cesbron
Dans une ville des Bouches du Rhône, à qui il serait difficile de donner la mention de « ville propre », un fast food s’est ouvert il y a quelques années non loin d’une petite résidence tranquille. En quelques mois, nous avons vu surgir une pollution envahissante et les jardins accusent les assauts de ces dévoreurs de hamburgers, sur fond de musique « crachée » par un petit téléphone à la fois ridicule et bruyant.
Nous avons un échantillon permanent d’un manque d’éducation manifeste, d’une triste énumération de faits d’incivilités qui stigmatisent de façon très violente ce genre d’individu. D’une démission totale de beaucoup trop de parents.
En très peu de temps, on peut facilement observer ceci :
1- Manger tout le temps :
On peut constater que l’heure du repas n’a plus de sens. Dix heures du matin, dix-sept ou vingt deux heures ! A tout moment, glaces, frites, boissons gazeuses et hamburgers sont engloutis avec autant de classe qu’un porc se jetant sur des glands. Avez vous remarqué le nombre d’ado qui se promènent constamment avec des bouteilles de soda de 2 litres à la main (encore remplies bien sûr. Vides, elles resteront par terre pour 1000 ans)
2- Démission des parents :
Ils sont jeunes. De 12 à 16 ans et cela de jour comme de nuit. Sans surveillance, loin des parents, loin d’un repas de midi ou du soir en famille, comme tout un chacun le fait avec ses enfants. Il suffit d’être vendredi ou samedi soir ou en période de vacances scolaire et les voilà, cachés dans nos jardins privatifs, loin de chez eux, sans surveillance, sans le moindre respect de quoi que ce soit, cigarettes au bec et livrés à eux même.
3- Argent facile :
Ce sont souvent les mêmes enfants qui reviennent et nous les reconnaissons dans les quartiers voisins. Est-ce normal qu’à 14 ans, sur un scooter, ils puissent payer le plein d’essence de leur scooter avec de petites liasses de billets. Est-ce normal, que l’un d’entre eux, issu de parents que je recevais lorsque j’étais dans une structure d’aide aux personnes en difficultés, puissent être « équipés » avec des habits de marque de la tête aux pieds que je ne peux même pas payer à mes enfants et frimer à la dernière rare kermesse qui se fêtait encore dans le quartier, avec de nombreux billets de 50 euros au creux de sa main ?
4- L’enfer au paradis :
Ils choisissent des lieux sympathiques, pour y dévorer leurs substituts de repas. On ne peut pas leur reprocher leurs bons goûts. Le lieu est calme, limite romantique et bucolique mais … avant leur passage. Ils provoquent un fond sonore fatigant avec leurs téléphones portables transformés en poste de radio. Ils étalent de façon presque rituelle les déchets en carton et plastique. Comme un jeu stupide, ils polluent le lieu en quelques secondes et j’ai honte pour l’espèce humaine chaque matin devant cette désolation. Nous devons ramasser à leurs places afin de garder une sérénité, une vie paisible ou ce qu’il en reste.
5- Sans la moindre éducation :
Ils se permettent d’insulter quiconque oserait faire une remontrance. Sans peur, sans scrupule. De toute façon. Qui les arrêterai ? La police ? Ils ne viennent même pas. Il me semble, qu’en temps de crise financière et de crise écologique, la répression remplirai très vite les caisses de l’Etat. Les pollueurs ne sont jamais punis. Aucune brigade ou « police verte », banalisée, ne se promènent parmi nous afin de sauvegarder notre pauvre planète et pourtant.
Je me suis fais deux fois la réflexion en me baladant en ville. Devant moi, sous me yeux, impuissant, j’ai compté 17 incivilités en 1 heure la première fois et 12 la deuxième fois. Canettes, gobelets, sacs papiers de fast food, bouteilles en verres, crachats répugnants. Mais où sont les belles images de Nicolas Hulot ou de Yann Artus Bertrand ? L’émotion suscitée par les peuples du fin fond de la planète ne semble pas servir nos propres expériences.
Quand j’étais enfant, les consignes fonctionnaient bien. Pourquoi ne pas les remettre sur les gobelets, les canettes et bouteilles ? Je reste persuadé qu’en touchant au porte-monnaie de certains, nous réglerions un problème à la fois. Lentement mais sûrement. Aux entrées d’Aix en Provence, sur les bords du Realtor, dans les zones commerciales, sur le vieux port de Marseille, une vraie mine d’or !
J’ai assisté à une scène qui se passait dans ma rue. Deux jeunes s’étaient installés dans un parc pour enfants privatif et y finissaient un sac de fast food. Ils jettent leurs sacs à la poubelle et s’en vont lorsque vers 17 heures, des mamans investissent le parc avec leurs enfants. Mais l’un d’entre eux garde un gobelet avec son couvercle et monte à l’arrière d’un scooter, tout en y jetant discrètement le couvercle par terre avec sa paille. Une des mamans, scandalisée par le geste, l’interpelle. Chose bizarre, comme quoi tout n’est pas perdu, l’un des jeunes descend de l’engin et le ramasse. Mais c’est plus fort que lui, il insulte la jeune maman avec des expressions que lui seul comprend et une fois le gobelet en main, à trois reprise, il fait une danse ridicule avec le bras comme pour lui dire, « dès que tu ne regardes plus, je le jette dans les buissons ». Ridicule ! Entre le garçon qui va faire un geste humble pour plaider coupable et celui qui va faire un geste stupide pour prouver à ses copains qu’il ne se laisse pas « contrôler » par une femme.
Pour finir, au bout du chemin, il enfourche le scooter, fais un geste obscène et jette le gobelet. Il se sent vainqueur ! Sur qui ? Sur lui même ? On ne le sait pas.
A tout homme politique qui m’expliquerai que ces jeunes ne sont pas écoutés et que c’est encore la faute de la société, je leur propose de venir y vivre et de se lever toutes les nuits pour faire dégager leurs vacarmes constants. Je leur propose de sortir de leur résidence éloignée, clôturée et sécurisée et de venir affronter ces affronts permanents de provocations et d’insolences manifestes. En tant qu’ancien formateur, j’ai vite appris lorsque j’ai enseigné dans des structures sociales qu’aider signifie que les deux parties doivent le vouloir. On ne peut pas aider quelqu’un qui ne veut pas. Et qu’avons nous fait depuis 30 ans ? Comment avons nous fait croire à toute une génération que travailler et respecter autrui ne sert à rien ?
En conclusion. Les repas de fast food ont crées de nouveaux comportements impulsifs très caricaturés mais tristement réels. Est il encore temps d’enseigner aux futures générations que l’on ne peut pas faire payer à la nature notre perpétuelle insolence.
Lorsque l’homme aura coupé le dernier arbre, pollué la dernière goutte d’eau, tué le dernier animal et pêché le dernier poisson, alors il se rendra compte que l’argent n’est pas comestible.
(proverbe indien)